vendredi 8 février 2008

Le marketing total de "Cloverfield


Agé de 41 ans, J. J. Abrams, qui a produit Cloverfield, est un des hommes les plus en vue d'Hollywood. Producteur et scénariste de séries télévisées à succès, comme "Lost" et "Alias", réalisateur du film Mission impossible 3, il a signé en 2006 un contrat extravagant avec la major Paramount, à laquelle il a concédé pour cinq ans, et en échange de plusieurs millions de dollars par an, un accès prioritaire à certains de ses projets.

Cloverfield, de Matt Reeves, qui vient de réaliser aux Etats-Unis le meilleur démarrage de tous les temps pour un mois de janvier, est le fruit de cet accord. Après que le jeune producteur leur eut présenté l'idée d'un film catastrophe tourné en caméra portée pour un budget de 25 millions de dollars (ce qui est très peu à Hollywood) et bien qu'incrédules devant cette équation peu conforme à leurs schémas de production habituels, les patrons du studio ont payé pour voir et élaboré avec leur nouveau poulain une stratégie de marketing viral directement inspirée de celle qui fit, en 1999, le succès du Projet Blair Witch, de Daniel Myrick et Eduardo Sanchez.
A lui seul, ce poste aurait englouti autant d'argent que la production elle-même, ce qui a conduit à une curieuse inversion des priorités. Le réalisateur, Matt Reeves, a en effet dû tourner la bande-annonce avant de commencer son film. "Nous avions la possibilité de passer la bande-annonce du film avant le blockbuster Transformers (distribué par Paramount), explique-t-il. Ce qui était une opportunité extraordinaire. Mais cela exigeait qu'elle soit terminée pour la date de sortie du film, en juin. Sur les douze semaines de préparation, nous en avons passé huit à tourner la bande-annonce."


LA LIBERTÉ DÉCAPITÉE


Sans regret, Matt Reeves estime que cette situation d'urgence l'a poussé à trouver le style du film. " Cloverfield est un film sur et pour une génération qui se filme elle-même vingt-quatre heures sur vingt-quatre, poursuit-il. Nous ne pouvions pas nous permettre de faire semblant de filmer avec une caméra manuelle. Il fallait envisager ce que cela impliquait en termes de réalisation, à savoir : renoncer à filmer sous différents angles, mais s'en tenir à un seul, et prévoir à chaque fois une chorégraphie pour la caméra qui permette de montrer exactement ce que l'on voulait."

La bande-annonce, dans laquelle on voyait la ville de New York dévastée et la statue de la Liberté décapitée, ne comportait pas de titre et, après sa diffusion en salles, la campagne promotionnelle s'est poursuivie sur Internet sur un mode énigmatique, à grand renfort de blogs, de faux journaux télévisés, de rumeurs en tout genre...

Résultat : le film démarre sur les chapeaux de roue dans tous les pays, mais la chute sévère qu'il enregistre aux Etats-Unis en deuxième semaine (- 68 %) témoigne d'une réelle déception du public. Paramount, qui vient d'annoncer la mise en chantier d'une suite, semble avaliser ce nouveau modèle de films jetables.

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